Gabon : les présidents de ligues nationales et l’association des clubs professionnels disent tout, après une nouvelle saison blanche
Libreville, 06 juillet 2024 (CLUB SPORT+)-Les deux présidents des ligues en charge de l’organisation des championnats d’élite homme et dame et le président de l’Association des clubs professionnels du Gabon, ont dressé un diagnostic sur la situation des championnats nationaux qui viennent d’enregistré une deuxième année blanche. La relatant l’historique de l’arrivée de l’ère professionnelle pour ce qui du championnat masculin dont les sources de financements ne sont identifiables dans aucun textes juridiques, les trois orateurs ont à la fin de cet échange avec la presse, posé les conditions de reprise des championnats nationaux pour la saison 2024-2025.
Le football d’élite gabonais est dans un coma profond, et personne ne peut dire le contraire au regard des tristes évènements constatés depuis plus de cinq ans. Entre saison jouées en dents de scie et année blanche, comme c’est le cas depuis les deux dernières saisons, tous les ingrédients sont réunis pour déclarer la mort du football d’élite en République Gabonaise. Mais sous l’ère du Comité de transition et de la Restauration des Institutions (CTRI), les acteurs, dirigeants de clubs et joueurs, ont le droit de rêver à une amélioration de l’écosystème et du cadre juridique.
Pour éclairer la lanterne de l’opinion, l’Association des clubs des clubs professionnels du Gabon (ACPG), la Ligue nationale de football professionnel (LINAFP) et sa consœur, en charge de l’organisation du championnat amateur féminin de D1, ont tenu une conférence de presse conjointe, vendredi au Palais des Sports de Libreville, sous le thème « Restructuration des championnats nationaux ».
Landry Nkeyi, Brice Mbika Ndjambou et Odile Andréa Ossawa sans fard ont dressé un diagnostic alarmant des championnats nationaux d’élite qui, selon le président de la Linafp, ne disposent d’aucun texte de financement dans la loi de finance. Une révélation grave qui laisse à croire que les politiques ne trouvent plus d’intérêt à continuer à injecter les fonds pour l’organisation des championnats d’élite.
Sous un ton désolant, le président de l’ACPG fera constater : « Mon pays enregistre à ce jour et de façon consécutive deux saisons blanches du championnat de football. A savoir, les saisons 2022-2023 et 2023-2024 ».Ce qui amène au président d’Oyem AC de se montrer nostalgique à l’époque où le championnat gabonais avait le statut d’amateur. « On pourra tous noter qu’avant 2012, le championnat était amateur et soutenu par les ressources issues de l’inscription dans la loi de finance du championnat national de première division et l’inscription dans la loi de finance des budgets octroyés aux clubs gabonais engagés aux compétitions africaines », a-t-il souligné.
Mais en 2012, date de l’arrivée de ce qu’on appelle abusivement ‘’championnat professionnel’’, alors qu’il en n’est pas, l’Etat décide de mettre plus d’argent par les mécanismes hors budget relevant de ses partenaires parapubliques et privées. Le président de l’ACPG prendra pour exemple : « l’appui de la société Airtel Gabon à hauteur de 3 milliards FCFA pour les saisons 2014-2015, celle du Cocan pour la saison 2016-2017, et enfin, l’appui de Gabon Oil Compagny pour une somme de 1 milliard pour la saison 2018-2019 ». Des mécanismes fiables de financement qui ont malheureusement disparu, pour laisser place au système de mutualisation de charges, résolution des Assises du National-Foot organisées en 2021 par le Ministère des Sports à l’époque dirigé par Franck Nguema. Un système transitoire sur trois ans qui impliquait une fois de trop l’Etat dans l’organisation des championnats nationaux. Un modèle économique sous une nouvelle forme plus étranglant, engageait l’Etat à prendre en charge les visites médicales des joueurs, une partie des salaires des joueurs les entraîneurs principaux, le transport et l’hébergement des clubs lorsqu’ils évoluent hors de leurs zones géographiques. Une première dans le monde !
Assises d’Angondjé
Afin de sauver le football local qui venait de passer des moments sombres, avec la pandémie Covid-19, le gouvernement va organier la task-force sur le National-Foot avec objectif de relancer les championnats nationaux. C’est d’ailleurs à l’issue de cette grande rencontre que va être décidé de la création de la Ligue nationale de football féminin. Une avancée significative dans le développement du football féminin. Mais Landry Nkeyi et Brice Mbika Ndjambou, regrettent que cette grande messe de réflexion sur le football local, n’ait pas impliqué les acteurs : « Les clauses des Assises d’Angondjé, n’ont pas enregistré en amont, la participation des acteurs dans les comités de réflexions. Toutes ces difficultés rencontrées, ont entraîné des conséquences de ces modèles de financement », a fait M. Nkeyi.
Financement des championnats nationaux
Tout en reconnaissant la volonté des plus hautes autorités à donner un statut professionnel au championnat national de première division, le président de la LINAFP, rappelle que le championnat professionnel avait pour objectif de permettre aux acteurs de vivre de son organisation.
Dans la suite de son intervention, Brice Mbika Ndjambou fera une révélation choquante, sur les sources de financement du championnat dit professionnel, qui ne reposent, sur aucun support de loi. « Avant le championnat professionnel, nous avions un championnat amateur et nous connaissons ce qu’il y a comme implication dans l’organisation d’un championnat amateur (…). Si avant lorsque nous étions amateur nous pouvions prendre la loi de finance l’ouvrir, et constater que les 50 millions de FCFA octroyés à chaque club était bel et bien inscrits et ce qui revenait à l’organisateur de la compétition était également inscrit. En 2012 depuis la mise en place du championnat professionnel nous avons basculé dans du hors-budget ».
S’il est clair qu’il ne revient pas à l’Etat de financer l’organisation d’un championnat professionnel, le président de la LINAFP sur un ton solennel ajoutera : « Le financement du championnat professionnel n’existe nul part. Vous ne pouvez pas le retrouver quelque part, encore moins dans la loi de finance. Ça veut dire que depuis 2012, on organise un championnat dont on ne sait d’où viennent les sources de financement qui ne sont pas clairement identifiées », a-t-il lâché.
Marginalisation de la Linaffem ?
Odile Andréa Ossawa, président de la Ligue nationale de football féminin, abrégée Linaffem, qui prenait également part cette conférence de presse qui aura permis aux journalistes d’être édifiés sur les raisons d’une deuxième année blanche, a dénoncé la marginalisation dont est victime la Linaffem, pourtant créée par l’Etat le 22 septembre 2022 par l’ancien ministre des Sports Franck Nguema dont l’élection de l’actuel bureau, sera même pilotée par la Fédération gabonaise de football.
Mais sur le terrain, la présidente de la ligue féminine, constate que son organisation est très souvent et mise de côté ou oubliée lorsqu’il s’agit de discuter du football notamment, les championnats.
La Linaffem qui n’a toujours pas organisé un championnat digne ce nom et ne dispose toujours pas d’un siège jusqu’à ce jour, fait appelle à la Fégafoot pour l’accompagner à travers les financements que la fédération perçoit de la FIFA dans le cadre du programme Forward qui accorde une place de choix au développement du football féminin « Mon bureau et moi, lorsque nous avons été élus, nous nous sommes présentés au président de la Fégafoot. Ce jour, nous avons discuté sur notre existence. Le premier problème que nous avions posés au président fédéral, est celui du siège, il était prêt à nous aider il avait relevé qu’il revenait aussi au Ministère des Sports de faire ce qu’il avait à faire de son côté », relate madame Ossawa laquelle indique que les mêmes démarches ont été entreprises auprès de l’instance faîtière pour la demande d’un appui financier pour l’organisation du championnat national de D1. « Nous n’avons eu gain de cause », dira-t-elle.
Conditions de reprise
Au regard de ce qui précède, Landry Nkeyi, qui regrette la perte de motivation des acteurs, le retard dans la structuration des clubs et des ligues, la perte de prestige des championnats sur le plan local et à l’international, est formelle sur les conditions de reprise des championnats nationaux pour la saison prochaine.
Il exige : « le payement intégral de la dette 2022-2023, 2023-2024, la mise à disposition des sièges pour les ligues, la mise à disposition de la subvention 2024-2025, l’amélioration du cadre juridique à travers la loi 0033 /2020 du 22 mars 2021 portant orientation de la politique nationale du sport et de l’éducation physique en République Gabonaise ».